Aider les infirmier·e·s à gagner du temps et soigner leurs patients

Zonez ... Boomez ... Infirmiez !

Aujourd’hui, nous allons aborder le thème le plus redondant des politiques du moment en ce qui concerne la santé : la répartition de l’offre de soins sur le territoire …

Aujourd’hui, nous allons aborder le thème le plus redondant des politiques du moment en ce qui concerne la santé : la répartition de l’offre de soins sur le territoire …

Car on ne parle plus seulement du manque de lits à l’hôpital, de soignants, jamais de la qualité des soins, oh le gros mot … On parle désormais du fait qu’on ne peut plus se faire soigner « en ville », près de chez soi, par son médecin traitant et avoir la visite de son IDEL.

Drama.

« En ville » c’est pour dire « pas à l’hôpital » … C’est leur nouveau terme toussa-toussa « réseau ville-hôpital », vous avez tous entendu ? Oui … Donc ne vous sentez pas vexés les gens de la campagne, on ne vous en veut pas du tout, on vous oublie carrément. Sachez que ce réseau ne fonctionne pas parfaitement bien, il y a du couac dans 95 % des cas, genre : même pas de CR lors d’un passage aux urgences lorsque le patient revient avec un visage de Schtroumpf et quelques points de sutures orbitaux ; ou encore en sortie de SSR quand vous êtes prévenus par cousine Micheline que son oncle est rentré il y a 4 jours et se noie dans sa pants.

Le phénomène de « désert médical » s’est fortement accentué ces dernières années, la faute à : la féminisation des professions médicales (enfants, mercredis, week ends : oui ça ne fait pas très féministe dit comme ça, mais c’est juste la réalité, désolée) ; la diagonale du vide dans les installations médicales (sud-ouest / nord-est) ; le numerus clausus qui n’est plus censé exister mais qui sévit faute de places administratives ; les départs à la retraite massifs ; le changement des mentalités sociétales en général …

Une chose est sûre cependant, la convention CNAM de 1972 avec les médecins n’arrange rien : dans celle-ci, il est spécifié grosso modo qu’ils factureront des honoraires conventionnés (secteur 1 et 2) si et seulement si : on ne leur impose JAMAIS leur lieu d’installation … Cette convention de 72 et la charte de la médecine libérale écrite en 1927 ont été mises en place pour protéger une corporation sous couvert des droits fondamentaux des patients.

Tadam !

Ils ne sont pas comme ton professeur de sciences médico sociales qui habite à Villefranche de Lauraguais et doit aller travailler à Moissac (105 kms l’aller easy) tous les jours car c’est un système de répartition de points et de « vœux » qu’on n’obtient jamais, sur un zonage étendu et généreux (avouez que l’éducation nationale nous fait concurrence dans la qualité) ; et il n’est pas comme l’IDEL qui ne peut pas s’installer dans la zone qu’il souhaite …

Ils ont la liberté de choix, et on ne pourra pas leur imposer autre chose : c’est gravé dans le marbre. Ainsi, des boîtes en forme de photomatons sont apparues dans les pharmacies pour faire de la médecine libérale en visio – et interdire peu après certains arrêts de travail fais par ce biais ; les maisons médicales flambants neuves payées par des contribuables, mais vides, proposant des secrétaires salariées territoriales poussent comme des champignons ; télémédecine ; maisons de santé … Tout un tas de nouveaux mots dans notre jargon apparaissent pour essayer de palier à ce phénomène catastrophique de répartition inégale de l’accès aux soins.

Les médecins libéraux, eux, font la moue : ils ont le power ! Aller habiter dans le Gers au moment où on devient vegan, évidemment ça ne fait pas rêver, je comprends.

Nous les IDEL, n’avons pas de convention comme la leur, on a des zones ARS, et une lettre clé à 3,15 euros brut depuis la nuit des temps. Magique. On a pas du tout le power, pourtant on devrait hein ^^, mais je ne vais rien vous apprendre : nous sommes totalement transparents aux yeux des pouvoirs publics !!! Le COVID, seuls à tout assumer « en ville », les étés caniculaires où tout le monde déserte du 1 au 31 Août, moi je ressemblais à un churro desséché (autre sujet épuisant), et l’essence pas un préfet ne prends de mesure pour que l’on puisse soigner dans de bonnes conditions. Allez, on vous a offert des dotations de masques wahou, et 0,04 ct brut de déplacement supplémentaire, soyez heureux !

Donc, quand on nous a tendu deux cartes, celle du pouvoir et l’autre, nous n’avons pas choisi la bonne. Je plaisante bien évidemment : on n’a jamais eu la carte du pouvoir … Nous avons tiré la fameuse carte « continuité des soins » (Five Stars, 1000 points au Paradis des Nonnes) qui permet de continuer joyeusement de travailler quand tu es malade, le jour de Noël, quand tu as le COVID, 365 days 7/7, de te débrouiller comme tu peux quand tes collègues sont absents, de sortir la nuit quand une poche de colostomie éclate, miam, ou que ton patient s’est déperfusé, et de ne jamais fermer ton cabinet, never.

YOUPI !

En pratique, médecins et IDEL sont tous soumis à la continuité des soins, mais eux, ils ont un autre truc merveilleux quand ils ferment tout : SOS médecins. Nous, on a pioché avec la sacrosainte carte « continuité des soins », la carte « zonage toute fraîche et revue en 2020 » => zone très sous dotée, sous dotée, intermédiaire, très dotée, surdotée.

Alors on va se résigner, et être résilient, des termes que l’on devrait apprendre carrément le premier jour d’IFSI en expliquant comment fonctionne cette machine diabolique de la CPAM-ARS, dont se félicite l’IRDES.

« Une récente étude de l’Institut de recherche et documentation en économie de la santé (IRDES) montre que les mesures visant à limiter les installations d’infirmiers libéraux (IDEL) dans les zones surdotées et à inciter ces derniers à s’installer dans les zones sous-dotées produisent les effets escomptés et favorisent leur meilleure répartition territoriale. ».

Trop cool.

Comment ça se passe pour nous lorsqu’on souhaite s’installer en zone dite tendue ? Dans un premier temps, il faut rechercher la zone dans laquelle vous voulez vous installer et là rien de plus simple (promis), c’est une carte interactive.

Lorsque vous avez trouvé la zone :

  • Très sous-dotée : 3 contrats ont vu le jour avec l’avenant 6. Ils sont incitatifs à l’installation et tripartite : PS-CNAM- ARS.
    –> Le contrat d’aide à l’installation infirmier (CAII) : le montant de l’aide financière allouée en contrepartie du respect des engagements est de 27 500 € contrat sur 5 ans (non renouvelable). À cela s’ajoutent 150 € par mois
    si l’infirmier s’engage à accueillir un étudiant infirmier dans son cabinet pour son stage de fin d’études (pendant la durée du stage).
    –> Le contrat d’aide à la première installation infirmier (CAPII) : le montant de l’aide financière allouée en contrepartie du respect des engagements est de 37 500 € contrat sur 5 ans (non renouvelable). À cela s’ajoutent 150 € par mois si l’infirmier s’engage à accueillir un étudiant infirmier dans son cabinet pour son stage de fin d’études (pendant la durée du stage).
    –> Le contrat d’aide au maintien infirmier (CAMI) : le montant de l’aide financière allouée en contrepartie du respect des engagements est de 3 000 € par an, avec un contrat sur 3 ans (renouvelable). À cela s’ajoutent 150 €
    par mois si l’infirmier s’engage à accueillir un étudiant infirmier dans son cabinet pour le stage de fin d’études (pendant la durée du stage).
  • Sous dotée, intermédiaire, très dotée : installation et conventionnement habituel si vous remplissez les conditions exigées (expériences professionnelles et DEI) tout se fait en ligne ici : site installation-idel.ameli.
  • Surdotée : le principe est « un départ = une arrivée ». Si cela se produit sur le même cabinet l’IDEL qui part devra effectuer une lettre particulière à la CPAM, de « coaptation ». Un dossier complémentaire spécifique au conventionnement vous sera demandé. Quelques dérogations sont prévues : changement d’adresse avec une activité libérale sur le secteur depuis 5 ans, situation médicale grave d’un conjoint, et le remplaçant doit justifier de plus de 24 mois de remplas + 8 mois de soins réels dans la zone.

Certains ont vu une opportunité à cette nouvelle vague de répartition de l’offre de soins sur les territoires, pourquoi ne pas être IPA ? Enfin un avenant n°9 est en leur « faveur », dans des bassins où plus aucun médecin n’exerce, ils pourront être d’un grand secours ! Car on compte encore peu de pays, même en Europe, où il n’existe pas de métier intermédiaire se situant entre bac+3 (nous IDE) et bac+10 en santé, il serait opportun d’autoriser leur création.

Quelques-uns y sont favorables d’autres moins, ce serait nous laisser trop de responsabilités ; oui, car nous n’en avons pas apparemment jusqu’à présent (rires dans la salle). Toujours est-il que cela existe, les IPA sont inclus au Code de Santé Publique, il faudra donc faire avec et compter sur cette nouvelle profession en termes de promotion de la santé sur TOUS les territoires de France, ne serait-ce pas enfin un peu de POWER INFIRMIER mesdames messieurs … ?

Car de toute évidence, si on regarde bien les choses en face sur la répartition inégale de l’accès aux soins, grâce à cette liberté de choix médicale, un non-sens est intervenu … Il n’y a plus le « choix ».

Cecillio

 

Sources :

Ameli.fr / installation

Code de Santé Publique

Convention 1972 

IPA Avenant 9

La diagonale du vide 

Lexique :

IDEL – Infirmier Diplôme d’Etat Libéral
IPA – Infirmier en Pratique Avancée
CR – Compte Rendu
CNAM –  Caisse Nationale d’Assurance Maladie
CPAM – Caisse Primaire d’Assurance Maladie
ARS – Agence Régional de Santé

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